La cité punique de Kerkouane, située à la pointe de la péninsule du Cap Bon, est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, depuis le 28 novembre 1986.
Les témoignages les plus anciens remontent au VIe s. av. J.-C. ; quant à la fin de la cité, elle correspond au milieu du IIIe s. av. J.-C. (256-255).
Le site présente l’avantage d’avoir été définitivement abandonné, après avoir subi une destruction totale, lors de la première guerre punique.
La Tunisie et, plus généralement, la communauté scientifique internationale dispose de l’unique cité punique conservée.
Le faciès urbanistique, aujourd'hui visible sur le terrain, se situe entre la fin du IVe s. av. J.-C. et la première moitié du IIIe s. av. J.-C. L’espace urbain est réparti entre les citoyens, les divinités et les morts.
Un urbanisme bien conçu et un système de défense élaboré
La cité est protégée par une double enceinte murale qui enserre la trame urbaine. Des tours sont édifiées le long des remparts percés de deux portes monumentales et quatre poternes.
Des rues se coupent à angle droit et forment un damier aéré par des places. Pour l'évacuation des eaux usées et pluviales, des égouts et des collecteurs étaient prévus dans différentes rues de la cité. Il s’agit d’un urbanisme bien conçu, respectant un plan général préétabli.
Une architecture domestique standardisée
La maison méditerranéenne à cour centrale est le type le plus fréquent. C’est autour du patio, source d’air et de lumière, que s’ordonnent les différentes pièces de l’habitation. D’autres maisons, à structure en enfilade, attribuables au substrat libyque, ont été reconnues sur le site.
Le puits est présent dans chaque habitation. La salle de bains est l’élément distinctif de l’architecture domestique à Kerkouane; toutes les maisons en disposent. C’est le signe, sans équivoque, de l’importance qu’on accordait à l’hygiène corporelle. L’évacuation des eaux pluviales était assurée à l’aide de canalisations, de gargouilles, de gouttières, de cuvette et de caniveaux.
Différents types de pavements décorent les sols des habitations. Parmi les motifs ornementaux : signe de Tanit, poisson et fleur de lotus.
Le sacré à Kerkouane
Au cœur de la cité, sur la voie publique, se trouve le grand sanctuaire dont le plan est conforme au prototype sémitique où la tripartition forme la base du temple oriental : le vestibule, la cour dotée d’un autel et le podium où se dresse la cella abritant les images divines. En l’état actuel des connaissances, cet espace sacré se prévaut d’être le plus grand temple punique en Méditerranée occidentale. Il était ouvert à des cultes multiples.
L’univers des morts : architecture et croyances funéraires
Les nécropoles étaient extra-muros. Les tombes tripartites, qui se composent d’un puits de descente, d’un dromos (couloir) et d’une chambre funéraire, représentent la majorité des structures tombales reconnues à Kerkouane.
L’archéologie a permis une meilleure connaissance de l'organisation de la société des morts (architecture, pratiques et croyances funéraires). Les parois de la célèbre tombe VIII du Jebel Melzza portent un décor peint qui relateun récit en images évoquant le voyage de l’âme oiseau vers l’au-delà.
Le riche matériel, recueilli des tombes, s’étale entre le VIe et le IIIe siècles av. J.-C.
Une société citadine et une économie prospère
La population, évaluée à 2100 habitants pour 7 hectares intra-muros, avait beaucoup de commodités d’une vie citadine évoluée. La famille nucléaire était la cellule de base de la société. Il y avait, vraisemblablement, des citoyens de plein droit, des hommes libres de condition inférieure, des esclaves, des autochtones et des étrangers.
La ville rassemblait surtout des artisans, des commerçants et des marins pêcheurs. Une zone, dédiée à l’artisanat, se trouvait, près de la place publique et à proximité immédiate de l’habitat et du sanctuaire. Cette place avait servi, sans doute, de marché où les artisans exposaient leur production. Le quartier des artisans et la place publique, qui avait servi de marché, constituaient, sans doute, le centre socio-économique de la ville.
La population de Kerkouane s’avère largement ouverte sur la Méditerranée et la culture des autres. Pour les modes, les goûts et les contacts culturels, on interroge les objets fournis par la Grèce, l’Italie du Sud, l’Egypte, etc. La documentation archéologique, relative aux rapports que la cité punique de Kerkouane put entretenir avec la Méditerranée, se distingue par la richesse et la diversité.