Forteresse (citadelle ou Bordj) de Kélibia
Fondée par les Grecs de Sicile à la fin du IVe siècle avant J.-C., rapidement occupée par Carthage, la forteresse de Kélibia fit toujours partie intégrante sinon dominante du paysage urbain ; construite au sommet d’un promontoire rocheux qui domine le large sur le flanc nord-est du Cap Bon, ce qui explique sa portée stratégique et justifie son exploitation ininterrompue jusqu’à nos jours.L’histoire de la ville antique, appelée Aspis par les Grecs que les Romains ont traduit par Clipea, c’est-à-dire bouclier, est intiment liée à celle de sa citadelle considérée à juste titre comme l’emblème de la cité et dont l’emplacement détermina le choix du site et son évolution urbaine.
Dans ses parties les plus anciennes, la citadelle comporte un noyau punique. Mais les scientifiques, grâce à des fouilles et des levés topographiques, sont parvenus à restituer les plans de sa première fondation, aux IVe - IIIe siècle avant J.-C. et qui montrent un ouvrage plus étendu, plus fortifié, de forme pentagonale, parfaitement adapté à la topographie du promontoire sur lequel elle fut édifiée. Détruit à la chute de Carthage en 146 avant J.-C., l’ouvrage a été partiellement restauré au VIe siècle par les Byzantins qui y ont érigé un fortin qui s’élève encore au milieu du borj. Celui-ci servit au siècle suivant de refuge à leurs dernières troupes fuyant les conquérants arabes pour se réfugier dans l’île voisine de Pantelleria. Ce même fortin été transformé au VIIIe siècle par les musulmans en ribat, genre d’observatoires fortifiés, occupés par des ascètes tout au long de la côte nord-africaine pour la surveillance des mouvements de la flotte chrétienne venue de l’autre côté de la Méditerranée. Au XIe siècle, les Normands de Sicile s’emparent du rocher qui ne leur sera repris qu’en 1112 au prix d’un conflit très meurtrier. Le prince ziride Yahya, artisan de cette victoire, fera reconstruire la place forte. Le tracé et l’essentiel des structures actuels datent de cette époque-là. Ensuite, il advint d’elle ce qui advint de la plupart des forteresses de Tunisie, une fortune diverse : centre mystique sous les Hafsides, renforcement des défenses de la citadelle au XVIIe siècle, dégradation et déclin jusqu’au XIXe siècle, lorsque les Français, maîtres du pays, dotèrent le monument d’un phare et d’un centre de transmission maritime.
Avec sa superficie avoisinant un hectare et demi, la forteresse de Kélibia est l’une des plus grandes forteresses islamiques du Tunisie. Elle est ceinte d’une courtine en moellons flanquée de tours barlongues. Une porte unique dans la façade Est donne dans un couloir droit qui mène vers une grande place occupée au centre par des citernes d’eau datant de l’époque romaine et les vestiges d’une mosquée datant de la période aghlabide